L'assurance chômage, un droit pour tous

La réforme de l’assurance chômage doit aboutir à un droit plus universel et plus juste !

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A une époque où il devient de plus en plus rare que les salariés effectuent la totalité de leur carrière professionnelle dans la même société, ceux-ci peuvent connaître des périodes de chômage plus ou moins longues et se retrouver ainsi au rang des demandeurs d’emploi.

Le régime d’assurance chômage est un régime paritaire obligatoire et contributif. Il offre aux actifs la possibilité de bénéficier d’un revenu d’assurance temporaire lorsqu’ils sont involontairement privés d’emploi.

Afin de parfaire le régime actuel, qui n’assure une protection qu’aux seuls salariés du secteur privé, Emmanuel Macron, dans le cadre de son vaste programme social, s’est engagé à réformer l’assurance chômage et à la faire évoluer d’un régime d’assurance à un régime de protection permettant d’accompagner la mobilité professionnelle. Elle devrait permettre à tous les travailleurs, artisans, commerçants, entrepreneurs, professions libérales et même les agriculteurs d’avoir droit à l’assurance chômage.

Cette réforme fait partie du « Projet de loi pour choisir son avenir professionnel », qui intègre également la réforme de la formation professionnelle et de l’apprentissage. Elle sera réalisée selon la procédure législative ordinaire : un projet de loi présenté en Conseil des ministres le 25 avril 2018, puis discuté au Parlement afin que la loi soit votée et adoptée durant l’été.

Mais en amont, un long processus de négociations avec l’ensemble des partenaires sociaux (CFDT, CFE-CGC, CFTC, CGT, FO côté salariés et le MEDEF, CPME et U2P pour les employeurs) s’est engagé dès le mois de novembre 2017 pour se terminer fin février 2018. L’accord national trouvé le 22 février 2018 doit être signé par les parties prenantes. Mais certains syndicats, tels la CFDT, la CFE-CGC, ont annoncé qu’ils ne signeraient l’accord que si le Gouvernement s’engage à le mettre en œuvre tel qu’il a été conçu par les partenaires sociaux. Le Gouvernement de son côté a déjà acté les points clés de la réforme avant de la présenter en Conseil des ministres.

Quels sont les points de négociation ?

L’objectif du Gouvernement est de mieux adapter l’assurance chômage au marché du travail en protégeant certaines catégories de population.

Ainsi, les principaux points de la réforme concernent la création d’un droit à l’assurance chômage pour les salariés démissionnaires, la création d’un nouveau droit pour les travailleurs indépendants, un meilleur accompagnement dans la recherche d’emploi, la lutte contre les contrats précaires (CDD, contrats d’intérim) et un contrôle des chômeurs plus efficace. Le projet prévoit également une évolution du financement et de la gouvernance de l’assurance chômage (UNEDIC), afin d’en limiter les pertes financières qui atteignent un cumul de 37,5 milliards d’€ en 2018.

Salariés démissionnaires

Alors que les négociations sont bouclées, les salariés démissionnaires auront bien droit à l’assurance chômage aux conditions suivantes, afin de bénéficier d’une « allocation d’aide au retour à l’emploi projet » : ils devront justifier d’une affiliation antérieure de cinq ans dans l’emploi et poursuivre un projet d’évolution professionnelle. C’est une commission paritaire régionale qui validera le caractère réel et sérieux du dossier.

Le dispositif pourrait concerner plus de 20 000 salariés par an, pour un coût qui devrait se situer aux environs de 180 M€.

Toutefois certains cas de démission considérés comme exceptionnels et légitimes subsistent (démission pour suivre un conjoint muté professionnellement, démission en raison d’un mariage entraînant un changement de résidence, déménagement pour se rapprocher du lieu d’hébergement d’un enfant handicapé).

Lutte contre l'abus des contrats courts

L’abus de CDD et de contrats d’intérim est coûteux pour le régime de l’assurance chômage et conduit à des situations précaires pour les salariés. Depuis la Convention du 14 avril 2017, les organisations paritaires de chaque branche doivent réaliser un diagnostic afin de prendre des mesures pour réduire le recours aux contrats courts et la précarité. Les branches ont jusqu’à décembre 2018 pour prendre les mesures destinées à modérer le nombre de contrats courts.

L’accord du 26 février 2018 prend acte de la mise en œuvre de ces mesures incitatives. Il prévoit que si elles s’avèrent non satisfaisantes, le Gouvernement mettra en œuvre un système de bonus-malus appliqué sur les cotisations patronales d’assurance chômage et qui sera inscrit dans la loi.

Par ailleurs, l’accord prévoit également de mettre en place un outil de suivi statistique qui permettrait de mieux caractériser et comprendre les causes des contrats courts.

Une nouveauté concernant les travailleurs indépendants

La garantie d’un revenu en cas de période de chômage est une protection et des travailleurs indépendants peuvent avoir besoin d’une telle protection. Mais la diversité de situations rend complexe l’appréciation du risque à assurer. La prise en charge de ces situations nécessiterait l’instauration d’une contribution financière particulière.

Face à l’inacceptabilité de la mise en place d’une telle contribution, le texte plaide pour un régime distinct de l’Unédic, public et financé par la CSG, ouvert à tous les indépendants. Ainsi, le projet de loi prévoit un droit de 800 euros par mois pendant six mois en cas de liquidation judiciaire, à la condition que le travailleur indépendant ait réalisé un bénéfice de 10 000 euros minimum par an. Cette mesure concerne les agriculteurs, les artisans, les micro-entrepreneurs et les commerçants indépendants.

Mais par ailleurs, des régimes privés assurantiels peuvent proposer en sus, des prestations complémentaires mieux adaptées aux spécificités des situations individuelles.

Un contrôle accru des chômeurs

Le Gouvernement entend renforcer le contrôle des chômeurs et pour cela envisage de tripler les équipes de Pôle emploi qui passeront de 200 à 600 agents. Les chômeurs seront sanctionnés, après deux refus d’offres raisonnables.

Avec cette réforme structurelle, l’ambition du Gouvernement est de faire reculer le taux de chômage à 7,5 % (contre 9,3 % à fin 2017).

A.V.